Entre Berlin et Shanghai, il n’y a pas de point communs et tellement de différences qu’il n’y a certainement aucun intérêt à comparer. Entre Berlin et Shanghai, il y a 8406km, un vaste continent, 6 pays, des rivières, des montagnes et au moins un désert.

Voila, aucune raison précise des les relier. Sauf que mon parcours à moi m’a emmené à m’expatrier dans les deux, créant dans mon esprit un trait, un lien, une continuité.

Il y a quelques temps j’ai fait un rêve où je parlais allemand (allez savoir pourquoi, alors que j’essaye d’apprendre le chinois, que je vis en anglais et travaille en français, pourquoi faut-il que je rêve en allemand ??). Je me suis réveillée en pensant à Berlin, et la pensée de la ville ne m’a pas quittée de la journée. Il faut croire que cette nouvelle expérience migratoire fait ressurgir les sentiments, les sensations de la première.

La machinerie inconsciente de comparaison s’étant mise route, la première de mes idées c’est qu’il est plus difficile de tomber sous le charme de Shanghai que sous celui de Berlin… En arrivant à Berlin, je m’étais immédiatement sentie bien, c’était l’été, j’avais l’impression d’avoir atterrit dans une grande cité-jardin, où les gens prennent leur temps, vivent paisiblement dans un environnement créatif et quasi festif. Même dans mon auberge de jeunesse, je me sentais déjà chez moi. La capitale allemande est très vite devenue pour moi un genre d’idéal urbain, terre plus accueillante que mon propre pays. Arrivée à Shanghai, sous une pluie battante et une brume insondable, j’ai découvert une mégalopole en voie de développement, en chantier, bruyante, bitumé, polluée, offrant pour seul horizon un panorama de tours monotones. C’était saisissant mais beaucoup moins confortable. La première de mes pensées a été «mais qu’est ce que je fiche ici ?» et la première chose que j’ai faite, une sieste.

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Peut-être que c’est une déformation professionnelle, ou simplement une sensation normale un peu exacerbée, mais je n’arrive pas à faire abstraction de l’espace qui m’entoure. C’est la première chose que je voie, que je regarde, dont je sens l’impact consciemment sur mon corps, sur mon moral. Après avoir connue une expérience ultra positive de découverte d’un lieu, j’ai donc été confrontée à un espace plus hostile, qui m’a d’abord présenté ce que mes repères m’ont appris à juger désagréable, sans qualité, moche (!).

Mais la perception de l’environnement qui nous entoure dépend aussi de ce qui se passe en nous, non ? De Berlin à Shanghai, la vraie différence qui fait sens c’est certainement celle de mon propre statut. Là où Berlin m’offrait celui, privilégié, d’étudiante Erasmus, situation de détachement léger où l’on n’a d’étranger que ce qu’il faut pour être un brin exotique, Shanghai fait de moi une étrangère, un alien déraciné et sans repères. Les choses les plus élémentaires, comme manger, se déplacer, faire des courses, y sont des challenges quotidiens et trouver un moyen de communiquer avec les locaux ou bien trouver des semblables devient nécessaire, la communication apparaissant comme un besoin vital. Confrontée à ce genre de choses auxquels on ne peut penser tant qu’on n’y est pas confrontée, je repense à S. ou I. que j’avais écouté me raconter leur migration, leur Berlin et j’ai l’impression de les entendre d’une nouvelle oreille.

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Ca fait maintenant quasiment deux mois que je suis à Shanghai et il va sans dire que si je m’étais arrêtée à l’image que je garde de mon premier jour, je ne serai déjà plus ici. A m’efforcer de regarder davantage, à me frotter à la vie d’ici, à m’adapter (parce que dans tous les cas je n’ai pas le choix), je découvre pas mal de choses…

Ca arrive dans la suite…!

De Berlin à Shanghai

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