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Dàbǎo

2 avril 2013

Yaoundé, premières gorgées

 

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J’ai du mal à exprimer clairement cette ville, avec des mots précis et des expressions claires. 

Si d’ordinaire je trouve facilement mes marques dans les villes, et ce quelque soit leur taille, j’ai ici du mal à me repérer.

Ces difficultés sont d’abord dues aux plans et aux cartes, toujours incomplètes car ne figurant que les rues et les quartiers formels, là où la ville est constituée principalement de quartiers spontanés, dans lesquels les chemins de terre chaotiques, tantôt véritables artères, tantôt slaloms à travers les baraques ou la végétation, se substituent aux voies bitumées. Impossible donc d’évoluer à travers l’anarchie, de manière ordonnée. Si encore on pouvait repérer des points cardinaux ou des repères urbains pour s’orienter…

Mais la ville a cette deuxième caractéristique d’un relief tumultueux et répétitif, de collines et de vallées, qui brouillent la vue globale et perturbent l’orientation. Sans parler des routes qui zigzaguent comme elles peuvent, dans de drôles de détours sur cette géographie mouvementée.

Enfin et c’est peut-être ce qui m’empêche le plus au jour d’aujourd’hui de comprendre cette entité étrangère, s’y promener de manière continue et fluide s’avère chose compliquée. L’accès aux quartiers spontanés qui représentent 60% de la capitale[1] - et qu’on appelle un peu trop communément chez nous « bidonvilles » - est peuplé d’obstacles physiques et humains. A plusieurs reprises on nous déconseille où l’on nous interdit carrément leur accès, de manière bienveillante ou menaçante, sous prétexte d’un danger certain. Comment comprendre ce territoire, sans voir et appréhender ces blocs, morceaux entiers de l’anatomie urbaine ? Fourmillants de vie et de débrouille mais sacrément précaires, ils sont représentatifs d’une tradition –celle de bâtir sa maison – et d’une nécessité – celle de s’approprier une terre pour habiter, quand l’Etat ne peut subvenir aux besoins en termes de logement.

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Outre la compréhension, il reste les impressions. Les premières sont toujours les plus vives. Alors qu’un taxi nous transporte à toute allure de l’aéroport à la maison de Pascal et Léa (et la marmaille et les employés : famille camerounaise d’accueil pour ces deux mois et des patates), la ville se dessine progressivement à travers la végétation ; de manière très disséminée au départ, les bâtisses semblent isolées le long de ce qui est un axe majeur. Au fur et à mesure, un peu plus de concentration, même si ce sont toujours des unités, quelque peu éparpillées et jamais vraiment unifiées, qui font office de front bâti le long de la route. Un tronçon concentre bars et restaurants, ceux-ci, complètement ouverts se répandent sur le trottoir, animant joyeusement la nuit de leurs musiques et lumières multicolores. C’est au sommet de l’une des 7 collines de la ville, que l’on peut embrasser du regard une bonne partie de cette flaque construite dont les lumières scintillent faiblement. La ville semble complètement plate, seul son relief lui confère quelques hauteurs. Après les villes chinoises, le changement est un peu radical… Le taxi poursuit sa route jusqu’à s’arrêter dans un quartier résidentiel très calme, éclairé de quelques lampadaires où pas un chat ne rôde. Nous sommes devant une maison entourée de murs haut de 3m, surmontés de barbelés et surveillé par un gardien. De toute évidence l’insécurité règne chez les plus riches d’un pays aux violents contrastes.

Après quelques promenades, quelques trajets en taxi – le transport en commun ici – je reconnais un peu mieux les différents coins, je me suis trouvé certains repères. N’empêche que la ville me semble toujours un peu répétitive, toujours faite de bric et de brocs, pleine de trucs tout le temps, partout.

Un tissu bâti peu dense, des vides pleins.

Les routes, les rues jamais unifiées, jamais continues, toujours accidentées. Des obstacles toujours. Que ce soit les vendeurs en tout genre sur les trottoirs, les crevasses sur la voie, les publicités placardées ou les taxis qui ne cessent de se rabattre pour prendre ou lâcher des gens en route. Et partout de nombreux espaces non construits, des esplanades désertes, des dents creuses entre les bâtiments. Des fonds de vallée aussi, qui sont quelque fois méticuleusement cultivés ou simplement envahi par la végétation anarchique. De loin on voit le vert partout, mais de près on a toujours du mal à en profiter.

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Se distingue des quartiers résidentiels, un centre-ville qui date de l’époque coloniale et concentre tous les équipements, ou institutions administratives. Le centre commercial – non pas un bâtiment mais une zone, à distinguer du centre administratif où l’on trouve tous les ministères – s’articule autour du marché central, les rues adjacentes sont encombrées de commerces informel et de boutiques tenues par des indiens. Complètement congestionné par le trafic routier et les piétons qui s’y concentrent, il n’offre pas un seul  espace public pour respirer.

Quand on nous présente le plan de restructuration pour ce « noyau central », on a du mal à y croire tellement ça nous semble loin des soucis élémentaires auxquels les autorités pourraient s’attacher. Comme un modèle générique que l’on aimerait plaquer vite fait, bien fait, pour atteindre le statut de ville moderne et développée. Rêve d’une micro-minorité, ultra-riche et surement corrompue, dont on se demande s’ils ont déjà regardé la ville autrement qu’à travers les vitres teintées de leur auto… Histoire à suivre !

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[1] Le Programme d’amélioration des conditions de vie dans le quartier de Yaoundé 6 : exemple de changement d’échelle d’une démarche participative, Emmanuel Ngnikam, Emile Tanwa, Charles Tchougang et Sergio Olete-Josa, 2004

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12 mars 2013

Février

Février est déjà là.  Avec lui le froid glacial de Beijing, que l’on découvre sous un grand ciel bleu – dire qu’on m’avait vendu les nuages opaques de la pollution et l’air irrespirable ! Depuis notre hôtel perdu (comme nous en le cherchant) dans les hutongs[1], on explore quelques coins de cette immensité urbaine[2]. A commencer par la place Tian’AnMen, à l’échelle de la ville, démesurée. Mais surtout déserte, froide, surveillée. Barricadée de tous côtés, elle est encadrée à l’ouest et à l’est par l’Assemblée du Peuple et le musée national, des architectures staliniennes pas très commodes. Comme les gardes postés à chaque entrée. Au nord Tian’AnMen donc, ou la porte de la Paix céleste (entrée principale de la Cité Interdite), qui affiche encore fièrement le portrait de Mao. D’ailleurs au vu de la queue qui s’étend tous les matins devant son mausolée, il a certainement encore de beaux jours de défunt devant lui. Non loin de là, un opéra[3] bling-bling a remplacé les hutongs. Perdu au milieu de son étang, il est distant de tout et symbole de quoi ?

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Si vous voulez esquisser une coupe schématique de la ville (ben oui pourquoi pas ?) ou juste voir le soleil couchant briller sur les toits de la Cité interdite, je vous conseille vivement de grimper en haut de la colline de Charbon. De ce point on remarque le profil singulier de la capitale chinoise : un centre (première et deuxième couronne) très bas – de sorte que la Cité impériale soit la plus haute construction – et des couronnes extérieures,  au contraire très élancées. Pas de doute, c’est dans ces « faubourgs » que s’élève le Pékin moderne. Parmi eux retrouvez quelques réalisations de starchitectes : la CCTV de Rem Koolhaas et Galaxy Soho de Zaha Hadid. Mais la meilleure vision de ces quartiers de tours c’est celle, à demi magique, que l’on a depuis un taxi, la nuit, sur les routes surélevées. Au milieu des grattes-ciels, de la nuit et des lumières ponctuelles, à toute allure.

A Beijing, il fait tellement froid que tous les lacs sont gelés, même celui – éléphantesque[4]– de Kunming (220ha), qui fait partie du majestueux Palais d’été. L’occasion de sortir ses patins à glace, ou sa luge pour vieux (version fauteuil), ou si on n’est pas très doué (comme moi et mon aînée) de simplement marcher dessus en essayant de ne pas se casser la margoulette (comme diraient mes ancêtres), ça sera déjà bien.  Le palais[5] s’étend sur le flanc de la montagne, des galeries aux perspectives infinies et colorées mènent aux différents halls, la disposition des différents bâtiments guidant l’ascension de la colline de la Longévité. L’ensemble est magnifique : les poteaux s’appuient sur le relief irrégulier, la pierre de la construction fait écho à son site tandis que le bois peint et les céramiques apportent des touches de couleurs lumineuses. Une vraie, belle promenade architecturale.

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Février, la Cité Interdite est sous la neige, figée dans une éternité silencieuse. Les halls se succèdent, alignés dans une harmonie parfaitement symétrique. De part et d’autre le dédale des allées attenantes, le charme des cours à demi cachées, des jardins secrets. Pourpre comme ses murs ou ses souvenirs planants : histoires mythiques d’Empereurs, de concubines et d’eunuques.

La grande muraille est elle aussi recouverte de blanc, mais son un ciel bleu on distingue son étendue infinie. Drôle d’ouvrage titanesque.

Une balade dans les hutongs et c’est déjà l’heure de quitter la capitale…

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Février se poursuit à Yangshuo, petite ville du sud de la Chine. L’arrivée  se fait à une soixantaine de km de là, à Guilin, dont on découvre à 1h du matin la douceur du climat. Après Pékin, on se croirait aux tropiques ! Un chauffeur nous aura heureusement attendus, malgré le retard du vol, pour nous conduire au Li village où j’ai réservé un hôtel. Il ne parle pas anglais et je me retrouve encore une fois frustrée de ne pas parler suffisamment chinois pour lui faire la causette, alors qu’il nous conduit en pleine nuit. De la brume nocturne émergent les silhouettes quasi fantastiques des pics karstiques – étonnantes montagnes, très abruptes mais pas très hautes, qui émergent d’un terrain complètement plat. A la lumière des phares, j’ai l’impression d’avoir débarqué sur une planète mystérieuse. A la lumière du jour, ça ne me semble toujours un peu fou.

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On explore la région et ses champs fertiles à pied, à vélo et un peu en bateau. Après la grande métropole, ça ressemble à des vacances paisibles – au rythme de la vie, là-bas, à la campagne. On se fait chouchouter par notre hôte et un peu harceler par les habitants du coin qui veulent à tout prix nous faire prendre le bateau lorsqu’on veut marcher, nous vendre des trucs alors qu’on ne veut pas acheter ou nous guider dans une promenade qui n’a, de tout de manière, pas de choix multiples. On longe la rivière Li, on traverse champs et villages, on se perd un peu en route aussi, complètement déroutés par la géographie locale et les flèches dans tous les sens. En chemin on découvre le grand marché de Fuli, plein de bazar, de bruit et de tout ce qu’il est imaginable de manger (ou pas). Ca sent fort et ça fait grincer des dents de la mère, mais au moins on sait ce qu’il y a dans nos assiettes (du chien) vu qu’on découpe les carcasses juste sous nos yeux.

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Qui dit février dit nouvel an, les rues sont désertes et renvoient l’écho tonitruant des pétards, qui explosent à tour de rôle devant chaque palier. Aux alentours de minuit, les décibels atteignent un niveau inimaginable.

Février c’est aussi l’heure de faire mes adieux à Shanghai. Les derniers jours s’enchainent au pas de course et me voilà déjà dans le taxi, qui me conduit à l’aéroport sous les feux d’artifices persistants. Je n’avais pas eu le temps de réaliser et puis tout d’un coup c’était la fin…

 



[1]  Système urbain constitué de ruelles étroites qui desservent les siheyuan (habitation traditionnelle chinoise organisée autour d’une cour). Typique de Pékin, son équivalent shanghaien serait le lilong, qui lui est davantage caractérisé par le mélange des modèles occidentaux et chinois. Quartiers très bas, ils sont néanmoins denses car si les siheyuan étaient initialement pensé pour abriter une famille, plusieurs s’y entassent désormais.

[2] Pékin fait 16.000km² (et dire que je trouvais Shanghai immense avec ces 6400km² !)

[4] On n’emploie pas assez cet adjectif je trouve. (Pour ceux qui auraient des doutes, non le lac n’a pas la forme d’un éléphant)

[5] je dis « le palais », mais il faut plutôt se représenter une succession de palais, de galeries, de pavillons, etc. Au total environ 3000 bâtiments tout de même.

 

5 mars 2013

Janvier

Janvier, le temps qui file, les jours qui s’écoulent et tout qui s’accumule. La fin du stage se rapproche, la liste des choses à faire s’allonge : des trucs pas rigolos, mais aussi une palanquée de restau à tester, des lilongs à explorer, des musées à visiter, et surtout pleins de moments à partager avec les amis.

du bordel

Janvier, les bonnes nouvelles. Un concours gagné, pour finir en beauté, et la perspective d’un prochain départ pour le Cameroun.

Janvier, c’est Flo qui arrive. Le départ d’un périple vers Hangzhou, Wuzhen, puis Beijing, où l’on retrouve les parents et Yangshuo avant de revenir leur faire découvrir mon Shanghai. Petit aperçu d’un grand pays.

HZ

Janvier est encore à Hangzhou. Hangzhou, c’est une ville que je ne pensais pas très grande, mais qui fait tout de même dans les 6 millions d’habitants (donc une ville moyenne chinoise), et qui est très appréciée des chinois –donc super touristique, ou autrement dit, grouillante de monde le week-end et pendant les vacances. Elle est surtout fameuse pour son immense lac (de l’Ouest – Xihu) entouré de montagnes qui est notamment représenté sur les billets de 1 yuan – et sur des milliards de photos aussi, du coup. Il y a tout un tas de temples et de pagodes disséminés dans les forêts alentours, notamment le temple de Lingyin, dédale de halls et d’escaliers qui se perdent dans la montagne. Une bonne manière de faire travailler ses guiboles. Mais le mieux (pour les architectes en herbe pour tout le monde) c’est d’aller visiter le Campus des Arts conçu par Wang Shu – le deuxième architecte chinois à recevoir le Pritzker Prize, en 2012 – escaliers-promenades, mosaïques d’ouvertures et maille de briques, y a pas à dire c’est un peu plus sympa que la fac de Nantes.

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Sur la route du retour on s’arrête à Wuzhen, ville de canaux mais surtout musée en forme de ville. Il faut payer un droit d’accès, relativement élevé (100 yuans – l’équivalent de 5 repas en Chine tout de même) pour se balader dans ses ruelles, dont les habitants encore présent ont été triés sur le volet et dont les maisons sont pleines de meubles et instruments inutilisés mais conservés, étiquetés et présentés aux visiteurs. Les tissus imprimés sèchent pour l’éternité tandis que les habitants se trouvent condamnés à deux rôles : nourrir les hordes de visiteurs et leur vendre des souvenirs génériques (mais pour le coup, là on peut être sur que ça sera du made in China). Peut-être que dans 50 ans, ils auront rajouté une statue de cire représentant un touriste se faisant prendre en photo devant un truc moisi –histoire de nous présenter le Wuzhen des années 2000.

5 mars 2013

Joyeux 2013 et bon serpent!

Ça fait bien trop longtemps que je n’ai rien posté sur ce blog… Janvier et février sont passés, mars est déjà là… et je ne vous ai toujours pas souhaité la bonne année ! Il paraît qu’on a le droit à un mois de délai (dixit mes ex-patrons, qui n’ont toujours pas envoyé leur carte de vœux), donc si l’on considère que j’étais en Chine et que je prends en compte le calendrier chinois (ou celui de mes patrons), je suis encore dans le timing. Je me contenterai d’un seul conseil – si vous arrivez à lire ce truc vous êtes assez grand pour profiter de la vie sans que je vous le souhaite – les serpents de signe, comme moi : portez du rouge toute l’année (surtout des ptites culottes) pour contrer la malchance qui va s’abattre sur vous[1].

Janvier, février, mars ! Récit accéléré des derniers périples en cette vaste Terre du Milieu et du retour en terrain connu…

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Pétards du Nouvel An

[1] Etre dans l’année de son signe porte malheur dans les croyances chinoises. Et le rouge lui, au contraire porte chance.

11 janvier 2013

Yuanyang - Duoyishi

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Une vue de carte postale ça se mérite. Duoyishi, c’est un peu le bout du monde… Depuis Jianshui c’est environ 150 bornes, pas grand-chose donc, si ce n’est 3 minibus différents et 5 heures de trajet à faire des bonds et se concentrer pour ne pas vomir. A Jianshui j’embarque dans le premier minibus, qui se remplit vite. J’y suis montée avec deux suisses déjà aperçues dans le bus Kunming-Jianshui et retrouvées à l’arrêt informel du bus pour la gare routière – T. et V. Nous sommes bientôt rejoint par 3 chinois, tout curieux de savoir ce qu’on vient faire là, en Chine, et ici au Yunnan. Peu après c’est un couple de trentenaires français qui s’installe, et pour finir un couple Suisse. Tous les sièges sont occupés et l’allée remplit des sacs grands voyageurs. Au bout de 2h30 d’une jolie et chaotique route descendant à travers les montagnes vers le fleuve rouge, nous arrivons à Nansha, la nouvelle ville de Yuanyang. Le chauffeur dépote aisément les passagers chinois mais ne sait visiblement pas trop quoi faire de nous autres étrangers. On se laisse passivement transférer vers un autre minibus, qui repart dans les montagnes pour une 1h30 supplémentaire. Petits villages, bananiers, terrasses agricoles apparaissent aux détours des lacets continus de la route. De manière tout à fait remarquable, je n’ai toujours pas vomi. Au bout du chemin, il y a Xinjie, la vieille ville de Yuanyang, surnommé Yuanyang (du nom de la région donc) par les habitants du coin. Autant dire que c’est un peu la galère de s’y retrouver quand on sait juste qu’on va à Yuanyang. En débarquant, on montre nos adresses d’auberge à celle qui nous cueille à la sortie du bus: elle nous embarque dans un troisième minibus. La route est bien proprement  goudronnée…  ah mais non c’est juste pour la case payante : un genre de péage incongru qui vous fait payer l’entrée … de quoi d’ailleurs ? Ce n’est pas comme si on était dans un parc naturel, non. Juste l’entrée d’une zone floue dans laquelle il y a les « best photographic point ». Avec des terrasses panorama moches et inutiles. Comme à Huangshan. C’est vraiment impressionnant de voir à quel point le tourisme en zone « naturelle » (comprenez montagnes, campagnes, tout ce qui n’est pas de la ville quoi), ne se résume qu’à leur potentiel photographique. Tout ne semble fait que pour que Mr. vienne ici, fasse sa photo – la même que tout le monde – et reparte gentiment. Bon on a quand même finit par arriver à Duoyishi, plus précisément à Pugao Laozai, petit village jaune construit sur les rizières et pour le coup vraiment charmant. Après un déjeuner franco-suisse tardif (ben oui du coup il est 16h), alimenté par des plats bien chinois – une manière jusque là jamais expérimentée d’ailleurs : pointer les ingrédients voulus, ils seront préparé à la manière de vos hôtes (avec beaucoup de poivre du Sichuan, par exemple) ; je marche un peu avec ce couple français dont j’ai fait la connaissance : A&A. Instits dans la région la Toulouse, ils partagent leurs années entre boulot et grands voyages (vous pouvez lire leurs aventures ici, vous qui n’êtes pas en pays censuré) et me rappellent fortement un autre couple d’instit que l’on avait croisé sur notre chemin en Bolivie.

Le lendemain, je les retrouve à 7h pour le lever du soleil - je vous ai prévenu les vues de carte postale ça se mérite. Manque de pot, il y a tellement de brouillard qu’on discerne à peine les rizières…  deux heures plus tard, on ne voit rien à plus de 5m… Et ça ne s’améliorera pas : on a passé la journée dans un nuage, et il n’y faisait pas chaud. C’est un peu agaçant d’être venue jusque là et de ne rien voir, mais dans le fond ça me fait plutôt rire – ce qui est mieux que l’inverse, non ? Ca a de quoi vous laisser méditer sur la niaise (mais pas fausse) expression « l’important n’est pas la destination, mais le voyage ».  Pour lutter contre le froid* et la morosité, on a bu du thé au gingembre toute la journée, joué au Jungle speed, au Uno et au Yam, on a mangé, papoter, rigolé et finalement passé une bonne journée. On a aussi fait une expédition dans le village la brume, au cour de laquelle j’ai été impressionnée de voir avec quelle aisance mes compagnons d’infortune, sans parler un traitre mot de chinois, arrivaient à dialoguer avec les autochtones ne parlant pas anglais. Ce qui est certain, c’est que ni la brume ni le froid n’empêchait ces derniers de s’activer : ils étaient occupés à couvrir la tôle d’un toit de paille (pour isoler quelque peu l’habitat ou pour préserver l’image du village?).

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Vu l’état brumeux quand je suis rentrée me coucher, je n’avais pas beaucoup d’espoir quant au lendemain… mais c’est toujours dans ces moments là qu’on a les meilleures surprises. En me trainant hors du lit vers 8h, j’ai découvert un ciel dégagé, qui est même vite devenu BLEU. Ca m’a fait tellement plaisir que j’ai eu le courage de me laver les cheveux  à l’eau toujours froide (le lien de cause à effet étant : j’ai cru que c’était vraiment mon jour de chance et que l’eau froide deviendrait chaude). Je suis ensuite partie me promener, seule, car mes rencontres françaises et suisses avaient déjà repris la route. Par hasard j’ai retrouvé deux chinois, dont l’un que j’avais rencontré la veille, et avec qui j’ai continué la route. On n’a pas tardé à se faire embarquer par un chinois et 3 Singapouriens, avec qui on a passé toute la journée finalement. Passionnés de photo, ils avaient l’attirail complet pour saisir les beaux reflets du coucher du soleil. Manque de pot, bis, le brouillard est revenu envahir « le » spot pour le sunrise, décevant ainsi un nombre impressionnant de photographes installés pour l’occasion.  

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De retour à mon auberge le soir, je me suis fait chouchouter par la matrone de mon auberge, parce que j’étais une fille, toute seule, et que je marchais. Je me suis aussi fait embrigader dans un dîner avec 4 quarantenaires chinois en vacances, ce qui était comique vu qu’ils ne parlaient pas anglais et que moi de toute évidence, une fois que j’ai dit « je suis française – j’ai 23 ans –je fais un stage à Shanghai –j’aime les pommes – je veux ça – un ticket pour Kunming – pardon - je ne comprends pas » j’ai atteint les limites de mon chinois. On a été rejoint par un couple de malaisien, un jeune british qui voyageait à bicyclette, un allemand et un jeune chinois qui a posé ses valises à Duoyishi pour quelques mois. Soirée idéale pour finir un chouette séjour à Yuanyang.

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NB : je n'insiste pas là-dessus, car ça me semble d'une ennuyante évidence, et que je n'ai certainement pas le talent de vous les décrire pendant des lignes sans vous endormir, mais les rizières sont impressionnantes et magnifiques bien sur. Je peux les ajouter sans soucis à ma liste des « trop beaux endroits de cette planète où j’ai eu la chance –pauvre petit insecte que je suis – de poser le pied »

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*il va sans dire que dans ce village, il n’y avait pas de chauffage, ni même d’eau chaude d’ailleurs, mais toujours des portes bien ouvertes

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9 janvier 2013

Jianshui

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Le premier jour de 2013, je reprends donc la route pour Jianshui, petite ville a 214km au sud de Kunming. J'y retrouve soleil et chaleur avec plaisir et peut abandonner manteau, écharpe et gants à l'auberge. Me voilà encore un cran en dessous sur l'échelle urbaine chinoise, ici il ne faut que 10min pour faire le trajet gare routière-rue principale, dont la hauteur ne s’élève qu’à deux niveaux. Sa particularité c'est d’avoir une ville historique incroyablement bien préservée et non pas reconstruite. J’y suis restée moins de 24h mais c’était suffisant pour en faire le tour - dans le sens touristique du terme, j’entends. Un travelling rapide sur la ville ça serait : l’immense temple de Confucius avec son lac – la Mer des Etudes qui représente l’étendue du savoir (la Chine a un don pour les appellations) et dans lequel se joue un concert - De multiples temples - Des spectacles de danses - Des gens qui jouent au mahjong partout, partout - Les fouetteurs de toupies - Les mangeurs de Tofu et les brochettes d’insectes – les gens qui se retournent trois fois sur moi – Les petites rues du quartier musulman et la mosquée tellement bien cachée qu’on la cherche encore – le soleil qui passe à travers les arbres – la tour face au soleil avec la lumière du matin.

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8 janvier 2013

Kunming

Kunming me laisse un souvenir glacé. Celui du froid infiltré dans tout mon corps et l'impossibilité de se réchauffer. Dimanche 30, les températures ont chutées un peu partout, y compris dans celle que l’on surnomme la ville de l'eternel printemps. Les prévisions météo m'avaient semblé étranges : autour de 18° tous les jours sauf dimanche : 4°. Lundi il n'a pas fait meilleur que dimanche. Je ne suis pas frileuse et me balader dehors en hiver ne m'a jamais dérangé, même à Berlin à -10° ou -20°. Mais a Kunming il fait froid dehors ET dedans. La culture de la porte ouverte et des fenêtres mal isolées, associée à l'absence de chauffage rend impossible la perspective d'un quelconque réchauffement de fin d’après-midi. La douche froide n'aide pas non plus. Et la nuit la couette ça n’est pas suffisant. Je me demande comment une ville aussi développée peut se passer de chauffage. Ca semble moins élémentaire que le wi-fi.

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Mais en faisant abstraction du froid – de tout de façon je suis en vacances et je suis en Chine, donc je m’en fiche- j’ai bien aimé cette drôle de ville. Les gens y sont sympathiques et s’excusent quand ils vous bousculent (!), il n’y a pas de pièces pour alourdir votre porte-monnaie, on n’utilise que des billets, même pour 1 yuan (environ 12cts) ou 5 mao (environ 6cts d’euros), il y a des gens qui font du commerce de pigeons dans la rue (je me demande encore s’ils font des combats de pigeons comme ceux de criquets, car vu l’attention que certains leur portaient, j’ai du mal à croire que ça ne soit que pour faire du pâté) et aucun moyen de trouver des cartes postales (quelle modestie pour une ville !). Et puis il y a la magie des toilettes publiques … où la culture de la porte ouverte a encore frappée! Du coup ici on les a carrément supprimées et puis on a aussi mis des murets à la place des murs pour vous faire partager ce moment avec les séparer des voisines.

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Comme je me suis embrouillée plusieurs fois dans les bus et leur arrêts, j'ai traversé la ville à 4 roues, celles des nouveaux bus et celles des vieux, tout branlants. Ceux-là sentent le gasoil à plein nez et peinent dans la moindre pente mais la bonne surprise c’est le redémarrage qui, à chaque fois, semble miraculeux. Ca m'a emmené vers des périphéries en constructions où les immeubles poussent comme des champignons et les nouveaux équipements fleurissent. Je me baladais avec un guide de 2010-11 de la Chine, mais en 2 ans, ces petites choses deviennent complètement désuètes… là où le Routard situait la gare routière du sud « la plus pratique et la mieux organisée », je n’ai trouvé que vieilles enseignes et salle d’attente à l’abandon ; un terrain vague a remplacé l’hôtel Camelia et son bureau pour acheter tickets en tout genre, un nouvel aéroport a été construit à l’autre bout de la ville, le métro a fait son apparition, le prix des tickets de bus a doublé…  et encore je n'ai certainement rien vu...

Après le bus j'ai parcouru une partie du centre à pied. Derrière les grandes avenues commerçantes, j'ai trouvé les vieilles rues de Kunming, où l'on déblaie les restes d'une architecture traditionnelle pour faire du faux-vieux. Quelques rues sont encore épargnées, à moitié en ruine, mais toujours debout avec leur charpente en bois et ornementation aux vives couleurs. Dans ces rues se répand le marche dit "aux plantes et aux oiseaux", mais avec davantage de stands de souvenirs. Des étals de perles, de sceaux, de poupées traditionnelles, de peignes de bois... Parmi eux un stand de jeux pour enfants, constructions en bois, qui expose la tour Eiffel, la cathédrale de st Petersburg et... la maison victorienne de quand j'étais petite... le made in China est vraiment partout…

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La ville possède un temple magnifique et un parc immense, surpeuplé d'oiseaux. Le premier est calme et reposant, empli du chant des moines et visité par quelques personnes qui viennent prier. Le second est lieu de rencontre et de balade. On y joue, on y danse, on y mange. Aux alentours plein de petites rues mignonnes, pavées et plantées "d'arbres des français".

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S’il avait fait beau j’aurai aimé aller marcher dans les montagnes autour de la ville, mais ça c’était si… et puis je n’ai pas finit de faire le tour de Kunming que c’est déjà l’heure de continuer vers Jianshui…

8 janvier 2013

(Parenthèse Yunnanaise)

Vendredi 28, 17h21. J'ai quitté le boulot une heure plus tôt que prévu, j'ai vérifié le contenu de mon sac prêt depuis 48h, contrôlé mon billet de train au moins 3 fois et rangé ma chambre de fond en combles... Excitée comme une puce, me voila à tourner en rond dans mon appartement, attendant impatiemment le début de mon voyage vers le Yunnan.

9 jours de pause, loin de la trépidante Shanghai, hors du bureau et sans les amis occidentaux. Une perspective qui me fait rêver depuis quelques mois déjà.

Ca commence par 37 heures de train, qui me permettront de rallier Shanghai à Kunming, 1950km, une bonne petite diagonale à travers ce vaste pays. Ensuite viennent Jianshui, petite ville de la province et Duoyishi, village perdu dans les rizières de Yuanyang. Pourquoi le Yunnan, pourquoi si loin? Pourquoi pas?

37h en train ca n'est pas si long... Juste le temps d'y faire deux nuits complètes, et de passer une journée à lire, à regarder le paysage défiler, à parler avec des inconnus et manger. Et puis il fait bien chaud dans le train, ca doit être le lieu public le plus confortable en Chine. Il faisait déjà nuit lorsque j'ai embarqué, je n'ai même pas vu Shanghai s'éloigner. Samedi matin voit paysages plats, zones en construction, et villages sans charmes se succéder. Le train fait de longues pauses, parfois au milieu de nulle part. Il se met à neiger. Le paysage prend du volume au fil de l’après-midi, des collines se dessinent, et bientôt des montagnes. Les terrains se cultivent en terrasses, jolies nuances de vert sous le ciel gris.

Le wagon sent les nouilles, la viande séchée, les pieds. Ce n'est jamais calme, je ne vois personne lire, mais des gens discuter, dormir, manger, jouer avec iphone et tout autre gadget hi-tech. Les chinois crachent dans les poubelles mais jettent les graines de tournesol évidées par terre. Toute la journée, des employés déambulent avec leur chariot pour vendre des plateaux repas et des snacks.

20 décembre 2012

Echo

En échos à l'article L'urbanisme à la chinoise, une petite émission intéressante sur France Culture : Chine : l'horreur urbaine

18 décembre 2012

Quartiers 1

La ville est tellement grande et variée que je ne la saisis que par fragments. Toutes les villes que je connais ont des quartiers mais leur influence, leur identité ne ressort pas toujours face la ville en générale.

A Berlin j’avais cette sensation que les quartiers avaient une identité propre, et disposaient d’une certaine autonomie que je ne connaissais pas des quartiers nantais ou parisiens. Pour moi c’était le résultat d’une histoire fragmentaire mais aussi d’un système gestionnaire davantage polycentrique que centralisé. C’est certainement aussi une histoire d’échelle, car plus l’on s’étale, plus la nécessité de fournir des services s’impose, segmentant la ville en aires (plus ou moins) autonomes.

A Nantes j’ai l’habitude de faire tous mes trajets à vélo, je peux traverser la ville, j’arrive à voir où elle commence, où elle s’arrête. Elle m’apparaît d’un seul bloc. Même si je fais la différence entre le cœur de la ville et les cités qui lui sont périphériques, même si j’identifie des coins aux atmosphères différentes, je me la représente comme une entité. Peut-être parce que tout fonctionne ensemble.

Ici j’ai parfois j’ai du mal à me rendre compte que j’habite dans une métropole de plus de 6.000km²… Et pour cause, du lundi au vendredi, j’habite et je travaille dans un rayon qui doit faire environ 4km².  J’habite dans ce quartier comme on pourrait habiter dans un village, je passe ma semaine à pied. Je peux aller au travail, faire mes courses dans une supérette chinoise, parfois dans une supérette occidentale quand je n’ai plus de beurre président, je sais où acheter des fruits pas chers, où aller boire un verre après le travail, où aller danser la nuit, où aller voir des films le mardi soir, où aller me faire une manucure, où manger chinois, japonais, coréen et même européen, où aller boire un café. Dans cette toute petite zone il y a un parc et un jardin de sculptures, un nombre inestimable de restaurants, des vendeurs de couettes, des réparateurs de vélos, au moins un hôpital. Il y a tout ce qui m’est utile, je n’ai pas besoin d’en sortir.

QUARTIER1

Ce périmètre de vie ne représente même pas un quartier en terme administratif, c’est juste un ensemble de quelques rues définies comme pertinentes par mon parcours quotidien. C’est un quartier mélangé : chinois et occidentaux s’y côtoient. On y trouve les traditionnels immeubles collectifs chinois de 6 étages et beaucoup de compound* d’une 20aine d’étages, comme celui dans lequel j’habite. Pas de mall en vue mais des petits commerces alignés tout le long de la FaHuaZhen Lu et de la Panyu Lu. Il y a des immeubles de bureaux, des tas de banques, une poste, un poste de police. Bref c’est l’inverse d’une zone monofonctionnelle. Il y a toujours du monde dehors, toujours un truc d’ouvert… C’est un quartier assez calme, non pas en terme sonore*, mais en terme d’ambiance. Pas de foule humaine dans ce quartier, il y a de l’espace. Ca c’est ce qui me fait douter parfois d’habiter dans une mégalopole de 20millions d’habitants… la ville est peut-être très peuplée, mais elle est tellement étendue qu’elle n’en est pas très dense. La foule ne se ressent que dans certains endroits localisés, mais ailleurs… rien de bien pire qu’une rue nantaise. Paradoxalement à l’image de monstre urbain que l’on pourrait s’en faire, Shanghai m’apparaît donc, à moi, à échelle terriblement humaine.

Du lundi au vendredi donc, je vis dans cette bulle et j’ai du mal à me figurer le reste de la ville… Heureusement dans ce périmètre, il y a aussi trois lignes de métro qui me permettent d’aller voyager dans toute la mégalopole le week-end venu...

*cf article coumpound

*cf article « un peu de calme et de spiritualité dans ce monde de brute »

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